Quelques instruments d’exploration

Les programmes habités vers la Lune et Mars

Si l’on considère les missions habitées vers la Lune ou Mars sous l’angle des connaissances scientifiques, il est possible de les rapprocher des missions de sondes spatiales.

En effet, si l’on prend l’exemple d’Apollo, dans les années 1960/70, ce programme a permis :

  • Le retour d’échantillons : Tout comme les sondes qui rapportent des échantillons d’astéroïdes ou de comètes, les missions Apollo ont ramené sur Terre des échantillons de roches lunaires. Ces échantillons ont été étudiés en détail dans les laboratoires terrestres, offrant une mine d’informations sur la composition, l’âge et l’histoire de notre satellite naturel.
  • Des observations in situ : Les astronautes d’Apollo ont effectué des observations directes de la surface lunaire, réalisant des expériences scientifiques et collectant des données qui n’auraient pas pu être obtenues par des instruments placés à bord de sondes sans équipage.

Cependant, il existe des différences fondamentales entre des missions comme Apollo et les missions de sondes spatiales typiques :

  • Les actions humaines : La présence d’astronautes sur la Lune a permis de réaliser des tâches complexes qui nécessitent une intelligence et une adaptabilité humaines. Les sondes, quant à elles, sont entièrement automatisées et suivent des programmes préétablis. A noter que cette présence humaine engendre une complexité accrue des missions, notamment vis à vis des questions de sécurité et de fiabilité.
  • Les objectifs : Si le programme Apollo avait un volet scientifique important, sont objectif principal était politique : démontrer la supériorité technologique des États-Unis dans le contexte de la Guerre froide. Les missions de sondes spatiales ont généralement des objectifs scientifiques plus précis et à long terme.
  • La durée : Du fait de sa complexité, le programme Apollo a nécessité plusieurs vols préparatoires. Le programme s’est donc étalé sur une quinzaine d’années. Par contre les vols eux-mêmes étaient de courte durée, alors que les sondes spatiales peuvent opérer pendant des années, voire des décennies.

Ces dernières caractéristiques ne seront certainement pas très différentes pour le programme Artemis, qui débute, avec pour objectif le futur programme habité vers Mars.

Ces trois programmes majeurs sont présentés plus précisément ci-dessous.

Apollo

Apollo 15 - NASA

Apollo 15 – © NASA

La mission globale :

Le programme Apollo, mené par la NASA entre 1961 et 1972, représente l’une des plus grandes aventures de l’humanité. Son objectif principal était de poser un homme sur la Lune et de le ramener sain et sauf sur Terre, un défi technologique et humain sans précédent. Ce programme s’inscrivait dans le contexte de la Guerre Froide, où la conquête spatiale était devenue un enjeu de prestige entre les États-Unis et l’URSS.

Origine et histoire :

Lancé par le président John F. Kennedy en 1961, le programme Apollo répondait à un besoin politique de démontrer la supériorité technologique américaine face à l’Union Soviétique, qui avait déjà envoyé le premier homme dans l’espace. Le défi lancé par Kennedy était clair : « Avant la fin de cette décennie, nous enverrons un homme sur la Lune et le ramènerons sain et sauf sur Terre.« 

Wernher von Braun, un ingénieur allemand ayant travaillé sur les fusées V2 et recruté par les États-Unis après la seconde guerre mondiale, est considéré comme le père de la fusée Saturn V. Il a joué un rôle déterminant dans le développement des lanceurs américains.

Mais le programme Apollo ne s’est pas construit en un jour. Il a bénéficié de programmes préparatoires cruciaux qui ont permis d’acquérir une expérience précieuse et de mettre au point les technologies nécessaires pour relever le défi lunaire :

  • Mercury : Ce programme a permis d’envoyer les premiers Américains en orbite terrestre basse, testant les équipements et les procédures nécessaires pour les vols spatiaux habités.
  • Gemini : Ce programme a été une étape intermédiaire, permettant de mettre au point les techniques de rendez-vous spatial et d’amarrage, essentielles pour les missions lunaires.

Organisation et construction :

L’agence spatiale américaine NASA était responsable de la mise en œuvre du programme. Mais de nombreuses entreprises américaines ont participé à sa réalisation, notamment :

  • Boeing : Construction du premier étage du lanceur Saturn V.
  • North American Aviation : Construction de la capsule Apollo.
  • Grumman : Construction du module lunaire (LEM).
  • Rocketdyne : Développement des moteurs F-1 pour le lanceur Saturn V.

Les différentes phases et dates clés :

Le programme Apollo s’est déroulé en plusieurs phases :

  • Missions Apollo 1 à 6 : 1967/68 – Vols d’essai sans équipage.
  • Apollo 7 : 11-22 octobre 1968 – Mission orbitale terrestre.
  • Apollo 8 : 21-27 décembre 1968 – Premier vol habité autour de la Lune.
  • Apollo 9 : 3-13 mars 1969 – Tests du module lunaire en orbite terrestre.
  • Apollo 10 : 18-26 mai 1969 – Répétition générale de l’alunissage.
  • Apollo 11 : 21 juillet 1969 – Premier alunissage, avec Neil Armstrong et Buzz Aldrin posant le pied sur la Lune.
  • Apollo 12 : 14-24 novembre 1969 – Alunissage de précision.
  • Apollo 13 : 11-17 avril 1970 – Mission interrompue en raison d’une explosion.
  • Apollo 14 : 31 janvier – 9 février 1971 – Alunissage dans la région de Fra Mauro.
  • Apollo 15 : 26 juillet – 7 août 1971 – Première mission avec rover lunaire.
  • Apollo 16 : 16-27 avril 1972 – Exploration des hauts plateaux lunaires.
  • Apollo 17 : 7-19 décembre 1972 – Dernière mission Apollo, avec un géologue à bord.
  • Apollo 12 à 17 : Missions d’exploration lunaire, avec des objectifs scientifiques plus précis.

Les composantes clés :

Décollage Saturn V - mission Apollo 11 - NASA

Décollage Saturn V – Apollo 11 – © NASA

Capsule Apollo - NASA

Capsule Apollo – © NASA

LEM - NASA

Module lunaire LEM – © NASA

Le lanceur Saturn V :

Le Saturn V était le lanceur le plus puissant jamais construit. Ses caractéristiques techniques étaient impressionnantes :

  • Hauteur : 111 mètres.
  • Diamètre : 10 mètres.
  • Poussée au décollage : 34 millions de newtons.
  • Nombre d’étages : 3.
  • Propulsion : Saturn V utilisait une combinaison de carburants liquides. Le premier étage, le plus puissant, était propulsé par cinq moteurs F-1 brûlant un mélange d’oxygène liquide et de kérosène (RP-1). Les étages supérieurs, quant à eux, utilisaient de l’hydrogène liquide et de l’oxygène liquide comme propulseurs.

La capsule Apollo :

La capsule Apollo était le vaisseau spatial qui transportait les astronautes. Elle se composait de deux modules principaux :

  • Le module de commande de la mission, où pouvaient vivre trois astronautes.
  • Le module de service contenant les systèmes de propulsion, d’alimentation en énergie et de contrôle thermique.

Le module lunaire (LEM) :

Le LEM était utilisé pour l’alunissage et le retour en orbite lunaire. Il se composait de deux parties :

  • Le module de descente utilisé pour se poser sur la Lune.
  • Le module d’ascension utilisé pour décoller de la surface lunaire et rejoindre le module de commande en orbite.

    Les astronautes du programme :

    Neil Armstrong-Michael Collins-Edwin Aldrin - équipage Apollo 11 - NASA

    Neil Armstrong-Michael Collins-Edwin Aldrin – équipage Apollo 11 – © NASA

    Au total, une cinquantaine d’astronautes ont participé au programme Apollo. Ils provenaient principalement de l’armée de l’air américaine. Ils étaient tous des pilotes d’essai expérimentés, ce qui était un prérequis essentiel pour pouvoir piloter les vaisseaux spatiaux de l’époque.

    Quelques noms célèbres

    Parmi les astronautes du programme Apollo, certains ont marqué l’histoire de l’exploration spatiale :

    • Neil Armstrong : Premier homme à avoir marché sur la Lune.
    • Buzz Aldrin : Deuxième homme à avoir marché sur la Lune.
    • Michael Collins : Pilote du module de commande d’Apollo 11, il est resté en orbite lunaire pendant que Armstrong et Aldrin exploraient la surface lunaire.
    • James Lovell : Commandant d’Apollo 13, il a vécu l’une des missions les plus dramatiques du programme Apollo, où un incident a failli coûter la vie à l’équipage.
    • Edgar Mitchell : Sixième homme à marcher sur la Lune, il est devenu un fervent défenseur de la paix et de l’exploration spatiale pacifique.

      Les résultats majeurs :

      Le programme Apollo a démontré la faisabilité des voyages spatiaux habités vers un autre corps céleste. Il a permis de nombreuses avancées scientifiques et techniques :

      • La connaissance de la Lune : Les échantillons lunaires rapportés sur Terre ont permis de mieux comprendre la formation et l’évolution de la Lune.
      • Le développement de nouvelles technologies : Le programme Apollo a donné naissance à de nombreuses technologies qui sont aujourd’hui utilisées dans de nombreux domaines, comme les matériaux composites, les ordinateurs et les télécommunications.

      Le futur des explorations habitées lunaires :

      Le programme Artemis, lancé par la NASA, à pour objectif de renvoyer des astronautes sur la Lune à l’horizon 2026. Ce programme s’appuie sur les leçons apprises lors du programme Apollo et vise à établir une présence humaine durable sur la Lune.

      Artemis

      Programme Artemis - NASA

      Programme Artemis (image d’artiste) – © NASA

      Lanceur Space Launch System (SLS) - NASA

      Lanceur Space Launch System (SLS) – © NASA

      Artemis - Lunar Gateway et module Orion - NASA

      Orion et Lunar Gateway – © NASA

      La mission globale :

      Le programme Artemis, successeur d’Apollo, vise à établir une présence humaine durable sur la Lune, en tant que tremplin pour l’exploration de Mars. Au-delà de la simple mission d’alunissage, Artemis prévoit la construction d’une station spatiale en orbite lunaire, la Gateway, et l’établissement d’une base lunaire.

      Organisation et construction :

      La NASA coordonne le programme Artemis en collaboration avec de nombreuses agences spatiales internationales et entreprises privées. Parmi les principaux partenaires, on retrouve l’Agence spatiale européenne (ESA), l’Agence spatiale canadienne (ASC), l’Agence d’exploration aérospatiale japonaise (JAXA), et de nombreuses entreprises américaines et européennes.

      Les composantes clés :

      Vaisseau Orion - NASA

      Vaisseau Orion – © NASA

      Lunar Gateway - NASA

      Lunar Gateway – © NASA

      Human Landing System -SpaceX and Blue Origin- NASA

      Human Landing System (SpaceX and Blue Origin) – © NASA

      Lunar Surface Habitat -NASA

      Lunar Surface Habitat – © NASA

      Le programme Artemis repose sur plusieurs éléments clés :

      • SLS (Space Launch System): Le lanceur le plus puissant au monde propulsera les vaisseaux Orion vers la Lune.
      • Orion: Le vaisseau spatial habité permettra de transporter les astronautes vers l’orbite lunaire et de les ramener sur Terre.
      • Lunar Gateway: La station spatiale, en orbite lunaire, servira de base pour les missions lunaires et de point de départ pour les missions vers Mars.
      • HLS (Human Landing System): Le système d’atterrissage lunaire amènera les astronautes à la surface de la Lune.
      • LSH (Lunar Surface Habitat): Le module d’habitation permettra aux astronautes de vivre et de travailler à la surface de la Lune pendant des périodes prolongées.

      Un programme en plusieurs étapes :

      Le programme Artemis se déroule en plusieurs phases, chacune avec ses objectifs spécifiques et ses composantes clés :

      • Artemis I (novembre 2022): Première mission sans équipage ayant testé avec succès le SLS et Orion lors d’un vol autour de la Lune. Cette mission a validé les performances du lanceur et du vaisseau spatial, posant les bases pour les missions habitées.
      • Artemis II (objectif actuel septembre 2025): Première mission habitée autour de la Lune. Cette mission permettra de tester les systèmes de survie à bord d’Orion et de préparer l’alunissage.
      • Artemis III (objectif actuel 2027): Premier alunissage depuis Apollo, avec un équipage mixte. Cette mission marquera un retour historique de l’humanité sur la Lune et permettra de tester les technologies nécessaires pour établir une présence humaine durable. Pour cette mission, le HLS et le Lunar Surface Habitat seront essentiels.
      • Phases suivantes: Les phases suivantes du programme Artemis visent à construire et à développer la Gateway, à effectuer des missions régulières vers la Lune, et à établir une base lunaire permanente.

        État d’avancement :

        Le programme Artemis est en constante évolution. Artemis I a été un succès, démontrant la capacité des États-Unis à retourner sur la Lune. Les équipes sont actuellement concentrées sur la préparation d’Artemis II et III, notamment en finalisant la conception du HLS et du Lunar Surface Habitat. Orion est en cours de développement par Lockheed Martin et Airbus Defence and Space. Et la Lunar Gateway est également en cours de construction par Maxar Technologies et Northrop Gruman.

        Objectif Mars

        Mission habitée vers Mars (image d'artiste) - NASA

        Mission habitée vers Mars (image d’artiste) – © NASA

        La conquête de Mars - ESA-Pierre Carril

        La conquête de Mars (image d’artiste) – © NASA-Pierre Carril

        Les futurs programmes habités vers Mars :

        Les programmes habités vers Mars représentent un défi immense pour l’humanité. Les enjeux sont multiples et les difficultés à surmonter sont très nombreuses. Néanmoins, les progrès technologiques récents et l’engouement du public pour l’exploration spatiale laissent espérer que les premières missions habitées vers Mars auront lieu dans les prochaines décennies. Ces missions auront un impact profond sur notre compréhension de l’Univers et sur notre avenir en tant qu’espèce humaine.

        Enjeux et objectifs :

        Les programmes habités vers Mars, qu’ils soient portés par des agences spatiales comme la NASA ou par des entreprises privées comme SpaceX, partagent des objectifs communs tout en présentant des spécificités :

        • L’exploration scientifique: Étudier la géologie, l’atmosphère, la climatologie martienne, chercher des traces de vie passée ou présente.
        • Le développement technologique: Mettre au point de nouvelles technologies pour les voyages spatiaux de longue durée, la production de ressources in situ, l’habitation dans un environnement hostile.
        • Un relai pour l’exploration du système solaire: Utiliser Mars comme tremplin pour de futures missions vers d’autres planètes ou lunes.
        • Une présence humaine durable: À long terme, établir une base martienne permanente et éventuellement coloniser la planète.

        Les enjeux sont considérables :

        • Scientifiques: Comprendre l’origine et l’évolution de la vie, la formation du système solaire, le potentiel d’autres planètes à abriter la vie.
        • Technologiques: Développer de nouvelles technologies qui auront des retombées sur Terre dans de nombreux domaines (médecine, énergie, matériaux).
        • Politiques et économiques: Renforcer la coopération internationale pour surmonter les défis techniques, stimuler les innovations et gérer les opportunités économiques que peut générer une telle aventure commune de l’humanité.

        Difficultés à résoudre :

        Les missions vers Mars posent de nombreux défis :

        • La durée du voyage: Le voyage aller-retour vers Mars peut durer plusieurs mois, ce qui nécessite des systèmes de support de vie très performants.
        • Les radiations: Les astronautes seront exposés à des niveaux élevés de radiations cosmiques, ce qui pose des problèmes de santé à long terme.
        • Les ressources: La production d’eau, d’oxygène et de nourriture sur Mars sera essentielle pour assurer la survie des astronautes.
        • Les aspects psychologiques: Le confinement prolongé dans un espace restreint peut avoir des conséquences psychologiques importantes.

        Premiers éléments de calendrier et état d’avancement :

        Les calendriers des différentes missions vers Mars sont encore très flous et peuvent être sujets à de nombreux ajustements. Néanmoins, voici quelques éléments :

        • NASA: La NASA travaille sur un plan à long terme pour envoyer des humains sur Mars, en s’appuyant sur les connaissances et les technologies développées actuellement dans phases II et III du programme Artemis. Les objectifs actuels de la NASA incluent en effet la mise en place d’une présence durable sur la Lune qui servira de tremplin pour les missions martiennes. Celle-ci démarrerait avec Artemis III dont le lancement est actuellement prévu en 2027. Mais la suite du programme reste à finaliser. Au-delà des obstacles technologiques/techniques importants à surmonter, elle dépend en effet notamment des financements alloués et de la volonté politique. La NASA a indiqué qu’elle espère envoyer des humains sur Mars dans les années 2030 ou 2040.
        • SpaceX: SpaceX, avec son programme Starship, ambitionne d’envoyer des humains sur Mars dès les années 2030. L’entreprise a déjà réalisé des progrès significatifs dans le développement de son lanceur réutilisable et de son vaisseau spatial.

        Autres acteurs potentiels :

        Mais d’autres acteurs publics ou privés pourraient également jouer un rôle important dans cette nouvelle conquête scientifique, humaine et stratégique.

        C’est notamment le cas de l’Agence spatiale européenne (ESA) qui collabore déjà étroitement avec la NASA sur de nombreux projets, notamment Artemis, précurseur des vols habités vers Mars.

        Un autre acteur majeur sera très certainement la Chine qui développe un programme spatial ambitieux et a déjà envoyé des missions robotiques sur Mars. Elle envisage à terme d’envoyer des taïkonautes sur la planète rouge.

        La Russie et l’Inde ont également des programmes spatiaux importants et ont réussi plusieurs missions vers la Lune et Mars. Elles pourraient envisager des missions habitées vers Mars à plus long terme.

        Mais d’autres acteurs privés pourraient également avoir des rôles clés. C’est par exemple le cas de Blue Origin qui développe des lanceurs réutilisables et envisage des missions habitées vers la Lune et, à terme, vers Mars.

        Δ  Ψ  Pour aller plus loin…

        • « First Man : The Life of Neil A. Armstrong »de James R. Hansen : Une biographie détaillée du premier homme à avoir marché sur la Lune, offrant un aperçu intime de la mission Apollo 11 et des défis rencontrés par les astronautes.
        • « Carrying the Fire : An Astronaut’s Journeys »de Michael Collins : Un récit personnel de l’astronaute Michael Collins, qui a orbité autour de la Lune lors de la mission Apollo 11. Il offre une perspective unique sur cette mission historique.
        • Site de la NASA sur le programme Artemis : https://www.nasa.gov/humans-in-space/artemis/